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25 octobre 2010

On est mal barré...

Parti Socialiste? Comme disait A. Hitler "quelle chance pour les dirigeants que les hommes ne réfléchissent pas"...

Adolphe je n'ai pas fini de le citer!

Retraites: l’insoutenable légèreté des socialistes
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  • Mais quand donc les socialistes parviendront-ils à se mettre d'accord sur les retraites et à ne plus parler que d'une seule voix, sans arrière-pensées ni hypocrisies ? Alors que le pays se dresse contre la réforme inéquitable voulue par Nicolas Sarkozy, il y a, de fait, quelque chose de consternant à observer ce parti se déchirer perpétuellement sur le sujet.Loin d'être en phase avec la rue, s'appliquant à lui offrir un débouché politique, il est sans cesse miné par ses vieux démons, ceux du présidentialisme et du cavalier seul, avec des hiérarques qui défendent des positions somme toute assez proches de celles de l'Elysée et d'autres qui sont clairement dans l'opposition. Et en bout de course, des désaccords majeurs sur les dispositions à mettre en œuvre et des déchirements publics, dont la droite cherche à tirer avantage pour imposer son projet.

    Que l'on veuille bien reprendre le film de la cacophonie socialiste depuis le début de l'année, on constatera en effet qu'elle ne s'est presque jamais interrompue. Ce qui jette un double trouble : sur la réelle détermination de certains dirigeants socialistes à faire reculer Nicolas Sarkozy – s'il ne faut pas parler en certains cas de double jeu ; et au-delà,sur la philosophie de la politique économique et sociale que conduirait le Parti socialiste s'il revenait aux affaires.

    Reprenons donc le fil des événements, il parle de lui-même :

    • Le 17 janvier. Martine Aubry jette les 60 ans aux oubliettes. Ce jour-là, la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, est l'invitée du Grand JuryRTL-LCI-Le Figaro. Voici ce qu'elle y dit :

    Cliquer ici pour écouter Martine Aubry

    Pour beaucoup de militants ou de sympathisants de gauche qui l'écoutent ce jour-là, c'est le coup de massue. Ou, pour être plus précis,c'est le cercle de la « pensée unique ». Alors qu'on ne connaît pas encore ce que sera le projet de Nicolas Sarkozy, Martine Aubry cède par avance sur un point absolument décisif : le maintien  des 60 ans comme âge légal de départ à la retraite : «On doit aller très certainement, on va aller très certainement, vers 61 ou 62 ans », dit-elle. Certes, elle prévient que cela ne sera acceptable qu'«à condition qu'on traite le problème de la pénibilité et le problème de l'activité des seniors». Et elle «n'imagine pas qu'on aille plus loin». Mais elle n'en casse pas moins le tabou de la retraite à 60 ans: «Si pour la première fois nous avons, depuis que Nicolas Sarkozy est au pouvoir, une réforme juste, qui va dans le sens du progrès social et règle un vrai problème, je serais heureuse d'y contribuer», conclut-elle. C'est presque une offre de service...

     

    Veuillez installer Flash Player pour lire la vidéo

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La fameuse retraite voulue par François Mitterrand et Pierre Mauroy en 1982 puis entrée en vigueur le 1er avril 1983, et vécue par beaucoup de Français comme un acquis social décisif, est sans débat jetée aux oubliettes.Quelques mois plus tard, le 10 octobre suivant, l'ancien premier ministre,Pierre Mauroy, intervenant devant le Sénat (voir la vidéo ci-dessus) rappellera avec émotion ce que cette réforme représente dans l'imaginaire socialiste. Des célèbres 110 propositions socialistes (on peut les consulter ici),c'était précisément la quatre-vingt-deuxième : « Le droit à la retraite à taux plein sera ouvert aux hommes à partir de 60 ans et aux femmes à partir de 55 ans. »

    Alors qu'elle occupait une place mythique dans l'histoire des premiers mois du gouvernement de gauche,avant que n'intervienne ensuite le tournant de la rigueur, la voilà donc rayée d'un trait de plume par la patronne du Parti socialiste. Dans la foulée,Martine Aubry fait lors de cette même émission un long plaidoyer pour un système de retraite à la carte. Elle n'use pas de la formule de retraite« par points », qui pour beaucoup à gauche fait figure de chiffon rouge, mais cela y ressemble fort, tant l'idée qu'elle préconise est d'individualiser le système de la retraite.

    Dès le lendemain, ces propos suscitent un très vif débat, qui transparaît dans toute la presse. Témoin le journal Libération, qui détaille la levée de boucliers que cette sortie suscite. Le quotidien évoque en particulier Jean-Claude Mailly,secrétaire général de FO, dont l'organisation s'oppose «clairement à une augmentation de la durée de cotisation ou à un report de l'âge de la retraite» ; ou le PCF, qui «regrette la position» de Martine Aubry. «Dans un contexte de casse de grande ampleur de notre protection sociale, la droite n'avait pas besoin d'un tel renfort », dit le PC. Même Pierre Moscovici prend ses distances : «Martine Aubry a voulu se poser comme une opposante constructive, montrer qu'elle était disposée à discuter. Mais cela m'interroge un peu. La retraite à 60 ans est une borne symbolique, je ne vois pas l'intérêt pour la gauche de la remettre en cause.»

  • « Ni 61, ni 62, dites-le à Martine... »
    • Le 18 janvier, Benoît Hamon fait du rétropédalage. Visiblement, Martine Aubry se rend pourtant compte très vite qu'elle vient de commettre une formidable boulette. Dès le lendemain, le porte-parole du PS a la délicate mission d'expliquer que Martine Aubry n'a pas vraiment dit... ce qu'elle a dit. Lors du point de presse, il s'y emploie donc du mieux qu'il peut, comme en rend compte peu après LExpress.fr: Benoît Hamon assure ainsi que le PS reste « attaché » au maintien de l'âge légal de la retraite à 60 ans. « Aujourd'hui l'âge légal du départ à la retraite est de 60 ans et le PS a toujours dit qu'il était attaché à ce que ce soit l'âge du départ à la retraite (...) Nous disons qu'il faut négocier avec les partenaires sociaux (...) et diversifier les recettes. Le pénibilité ne peut pas être une contrepartie au recul de l'âge du départ à la retraite », explique-t-il.
    • Le 26 janvier, Didier Migaud jette, lui aussi, les 60 ans aux oubliettes. Mais en vérité, la position qu'a défendue Martine Aubry,

      en livrant peut-être sans trop y prendre garde le fond de sa pensée, est celle que partagent un bon nombre de hiérarques socialistes. Pendant quelques jours, l'alerte de Benoît Hamon n'est donc pas entendue, et plusieurs voix s'élèvent, pour défendre la position de Martine Aubry. C'est par exemple le cas de Didier Migaud, qui est à l'époque le président (PS) de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Au cours d'un entretien vidéo enregistré le 26 janvier (voir ci-contre), lui aussi jette les 60 ans aux oubliettes.

       

    Tout est dit de manière allusive, presque anodine, comme si tout cela était affaire de simple bon sens et allait de soi. Didier Migaud explique ainsi que la réforme des retraites doit être conduite « sans tabou mais avec des lignes claires », concernant en particulier la défense de la retraite par répartition ou la prise en compte de la pénibilité du travail.

     

    — « Alors, c'est quoi ? 61 ? 62 ? 63 ans ?... », lui demande-t-on.

     

    « Eh bien ! Tout dépend beaucoup de la pénibilité du travail », répond celui qui, depuis, est devenu premier président de la Cour des comptes. Exit donc pour lui aussi la retraite à 60 ans.

     

     

    Du coup, cela devient un sujet de moquerie ou d'interpellation, notamment de l'extrême gauche. Exemple, ce meeting du Parti socialiste le 4 février suivant à Elbeuf : les militants du NPA viennent y interpeller (voir la vidéo ci-contre) la première secrétaire du PS avec un slogan en forme de moquerie vacharde : « Ni 61, ni 62, dites-le à Martine... ».

     

     

    • Le 27 janvier, le PS défend de nouveau les 60 ans. La vérité, pourtant, c'est que le Parti socialiste se reprend assez vite. Ce 27 janvier, un bureau national du parti fixe ainsi la règle, dont Le Figaro rend compte : les 60 ans doivent rester un droit. « Notre lecture, c'est que les 60 ans, c'est un droit, pas une obligation », décrypte Claude Bartelone.

    Dans les semaines qui suivent, le pas de deux de Martine Aubry n'est donc pas oublié – la droite essaie d'en tirer avantage. Mais, au fil des jours, on finit pas se prendre à penser qu'il s'est agi d'une maladresse – qui n'en commet ? – et qu'il faut aller désormais à l'essentiel : la gauche défend les 60 ans que la droite veut torpiller.

    Cliquer sur le tract ci-dessous pour l'agrandir

     

    • Le 23 mars, les Jeunesses socialistes veulent la retraite à 60 ans à taux plein. Ils diffusent un tract (voir ci-contre ou sur le site du PS), qui défend la retraite à 60 ans « à taux plein ».
      Cette formule prend donc l'exact contre-pied de ce qu'avait dit Martine Aubry. Mais cette défense d'une retraite à 60 ans « à taux plein » ne sera, dans les semaines suivantes, plus jamais utilisée dans les rangs socialistes.
    • Le 18 mai, le PS présente des contre-propositions de gauche. Ce sentiment d'un net ancrage à gauche du Parti socialiste est, de fait, renforcé quand sont enfin connues, ce 18 mai (voir notre article PS : un nouveau modèle facultativement à gauche), les propositions alternatives pour la réforme des retraites que la direction a mises au point, que l'on peut consulter ci-dessous :

    Pour agrandir le document, cliquer sur « Fullscreen »

     

     

     

  • La « subtilité » de Jean-Michel Charpin

     

    Ces contre-propositions du Parti socialiste concernant la réforme des retraites suggèrent en effet notamment d'alourdir de 25 milliards d'euros la fiscalité sur les revenus du capital d'ici à 2025. Comme nous l'expliquions à l'époque dans un "édito vidéo" (voir ci-contre), le ton est de gauche, et les mesures sont énergiques : majoration des prélèvements sociaux sur les bonus et les stock-options de 5% à 38% ; application de la CSG sur les revenus du capital actuellement exonérés et remise en cause de la défiscalisation des plus-values sur les cessions de filiales ; augmentation de la contribution sur la valeur ajoutée...

     

    Tout alors semble réglé. C'est comme un film en noir et blanc. Il y a la droite, emmenée par Nicolas Sarkozy, qui veut accabler le travail et épargner le capital ; et il y a la gauche, qui suggère de faire strictement le contraire. La valse-hésitation du début d'année est alors définitivement oubliée, puisque le principe est désormais gravé dans le marbre : « Le maintien de l'âge légal de départ en retraite à 60 ans est pour les socialistes une exigence. » Que demande le peuple ? Puisque l'on vous dit que le programme est bel et bien ancré à gauche...

     

    A l'époque où paraît ce programme, il n'y a pourtant pas que cela dans les suggestions socialistes. Sans que nul ne le remarque vraiment ni s'y attarde, il y a aussi, en bas de la page 7 du document, une proposition qui ne fait les gros titres d'aucun média. La mesure est présentée de manière très elliptique, sous un titre qui ne retient pas l'attention : « Pérenniser notre système au-delà de 2025 ». On y lit en particulier ceci : « Jusqu'à 2020, des dispositions sont prévues concernant la durée de cotisation. Les mesures que nous proposons (nouvelles ressources, abondement du Fonds de réserve des retraites, ré-haussement du taux d'emploi des seniors et retraite choisie) assurent le financement du système jusqu'en 2025 et sa pérennité au-delà. Les socialistes proposent des points d'étape réguliers tous les cinq ans avec les partenaires sociaux et une clause de rendez-vous globale sur le système des retraites en 2025. En cas de nouveaux besoins, il faudrait chercher toutes les sources possibles de financement. Si un allongement de la durée de cotisation devait être envisagé, celui-ci ne devrait pas excéder la moitié des gains d'espérance de vie, alors qu'aujourd'hui il représente deux tiers d'allongement d'activité, pour un tiers de temps de retraite. »

     

    Et que veut dire tout ce jargon technocratique ? Une formule en particulier a été magnifiquement ciselée pour que personne ne la comprenne : « Jusqu'à 2020, des dispositions sont prévues concernant la durée de cotisation. » Quelles sont ces mesures ? Et qui les a prévues ? Mystère et boule de gomme : c'est écrit de telle sorte qu'on y comprenne goutte.

     

    Mais quelle importance ! A l'époque, le secrétaire national du PS chargé d'élaborer le programme du PS dans lequel s'insèrent ces propositions, Pierre Moscovici, prévient que les documents soumis à la convention du 29 mai du parti ne sont, de toutes façons, qu'«une boîte à outils n'engageant pas le candidat» qui sera désigné pour la présidentielle. Traduction: celui-ci pourra y puiser s'il le veut ou bien définir une autre politique économique, si c'est celle qui a été ratifiée lors de ces primaires.

     

    * Le 19 mai, Jean-Michel Charpin révèle une « subtilité ». Si le PS a écrit son programme sur les retraites de telle sorte qu'on n'en détecte pas sur-le-champ toutes les habiletés, tout le monde n'est pourtant pas dupe. Dès le lendemain, le 19 mai, un haut fonctionnaire, Jean-Michel Charpin, l'ex-commissaire au plan nommé par Lionel Jospin, s'amuse de ce que la presse, dans ses commentaires, est sans doute passée à côté de l'essentiel.

     

    La scène, qui est rapportée par L'Express, a lieu aux Mercredis de la retraite, organisés chaque semaine par Eric Woerth, le très controversé ministre du travail. L'ancien commissaire au plan, qui est ce jour-là l'invité de ces agapes, s'attarde sur les contre-propositions dévoilées la veille par le PS en expliquant ceci : « Le texte est plus subtil que la lecture que les journalistes en ont faite. A un premier niveau, il y a le refus d'augmenter l'âge de liquidation de la retraite (60 ans aujourd'hui) et l'accent mis sur la recherche de ressources nouvelles. Mais un aspect nouveau n'a pas été commenté: le PS accepte les expertises du Conseil d'orientation des retraites. Et il prend acte de l'augmentation de la durée de cotisation inscrite dans la loi Fillon de 2003 jusqu'en 2020. Il admet des discussions sur ce point à partir de 2025. Le PS a donc écrit quelque chose d'important sans le claironner: il accepte la hausse de la durée de cotisation. Comme la loi Fillon la prévoit à 41,5 ans en 2020 et que l'âge moyen d'entrée dans la vie active s'élèvera à 22 ans, cela signifie que l'âge de départ en retraite sera de 63,5 ans en 2020. »

     

    Car c'est bien cela que veut dire l'elliptique formule : «Jusqu'à 2020, des dispositions sont prévues concernant la durée de cotisation.» Ces «dispositions» dont la plate-forme socialiste fait mention en se gardant bien de préciser ce qu'elles sont et d'où elles viennent, ce sont tout bonnement les dispositions d'allongement de cotisations insérées par François Fillon dans la réforme de 2003, et que le Parti socialiste ne conteste pas. Ou plutôt... ne conteste plus!

  • Un reniement sur l'allongement de la durée de cotisation

    Dans ces contre-propositions, il y a donc une tonalité en apparence très à gauche du PS : pas touche aux 60 ans ! Mais il y a aussi une tonalité qui l'est moins, ou en tout cas qui fait vivement débat dans les rangs de la gauche : d'accord pour l'allongement de la durée d'activité! En clair, si la retraite à 60 ans est maintenue, ce ne sera pas à taux plein, contrairement à ce qu'ont cru les Jeunesses socialistes quelques jours plus tôt. Compte tenu de l'allongement de la durée des cotisation, la retraite à 60 ans ne sera plus qu'en partie virtuelle puisqu'elle ouvrira droit à une pension incomplète.

    On se souvient qu'en 1995, lors de la fronde contre la réforme d'Alain Juppé, cette question de l'allongement de la durée d'activité, puis en 2003, avait constitué le clivage majeur, au sein de la gauche et au sein des organisations syndicales. La CFDT, en particulier, s'était ralliée à cette solution, et en avait payé un très lourd tribut. Quinze ans plus tard, le PS défend donc encore une solution du même type. Mais, instruit du passé, il n'ose le claironner trop fort.

    Il s'agit même d'un changement très net de doctrine, puisque en 2003, le Parti socialiste avait clairement pris position (voir par exemple ce communiqué de son bureau national) en faveur de la défense du « principe de la retraite à 60 ans à taux plein en fonction de la durée légale de cotisations, acquis social de la gauche au service d'une vraie qualité de vie ».

     

    Face à la réforme Raffarin-Fillon, qui planifie en 2003 cet allongement de la durée de cotisation pour avoir droit à une retraite à taux plein, de 40 ans alors jusqu'à 41 ans en 2012 puis 41,5 ans en 2020, et qui prévoit l'alignement du public sur le privé, c'est en effet le schisme au sein de la gauche syndicale et politique : la CFDT soutient ce dispositif, ainsi que quelques rares socialistes. Mais le PS, non ! Il ne veut pas en entendre parler et défend le maintien des 40 ans, comme la CGT, dont le leader, Bernard Thibault est vivement applaudi au congrès socialiste de Dijon (le site internet de LCI en porte encore témoignage).

     

    Plus que cela ! Considérant que la réforme Balladur de 1993, allongeant la durée d'activité de 37,5 ans à 40 ans dans le privé, a contribué à une très nette dégradation du montant des pensions, les socialistes admettent en 2003 qu'un retour en arrière « paraît désormais difficile » et acceptent un alignement du public sur le privé à ce niveau de 40 annuités, mais ils ne veulent pas aller au-delà ! Bec et ongles,  préviennent-ils, ils se battront contre tout projet, comme celui de la réforme Raffarin-Fillon, qui prévoit d'aller au-delà des 40 ans.

     

    Dans Libération, le 31 mai 2003, l'ancien ministre socialiste des finances, Michel Sapin, justifie ainsi l'opposition du PS à la réforme des retraites et regrette que Michel Rocard, qui fut l'un de ses mentors, « brouille le débat ». M. Rocard avait expliqué que les socialistes auraient agi sur les retraites comme François Fillon. Au même moment, le premier secrétaire du PS, qui est alors François Hollande, estime que les récentes déclarations favorables au plan Fillon d'intellectuels ou de politiques comme Michel Rocard, Jacques Attali ou Jacques Delors, « non mandatés pour s'exprimer au nom du PS », accréditent l'idée qu'il n'y aurait pas de différence entre la droite et la gauche. Pour couper court aux critiques, il fait valoir que, en cas d'alternance, en 2007, les socialistes reviendront sur la « réforme Fillon-Raffarin ».

     

    Rien de très inattendu, d'ailleurs. Car cette décision, en vérité, a fait l'objet d'un vote à la quasi-unanimité, lors du Congrès de Dijon, du 16 au 18 mai 2003 : la résolution votée prévoit la remise en cause de la réforme.

     

    Alors, cette « subtilité » dont parle Jean-Michel Charpin n'est en vérité rien d'autre qu'un reniement. Sans discussion, sans qu'un nouveau congrès ait annulé la résolution prise à Dijon, les socialistes se sont finalement ralliés à l'allongement de la durée de cotisation. Mais les Français l'ont-ils compris ? Ceux qui quelques mois plus tard vont manifester contre la réforme Sarkozy, ont-ils saisi toutes les habiletés de la plate-forme du PS ? Ont-ils compris que, dans l'esprit du PS, la retraite à 60 ans donnera lieu, à l'avenir, à une pension nécessairement diminuée, puisqu'elle serait adossée à un système de plus longues annuités pour disposer d'une retraite à taux plein ? Sans doute y a-t-il là une équivoque entre l'opinion et le PS qui n'a pas été levée : à travers la défense de la retraite à 60 ans, la première a pu comprendre que les socialistes étaient radicalement dans l'opposition. Alors qu'en vérité, ce n'est pas aussi tranché...

     

    • Le 20 mai, Dominique Strauss-Kahn refuse le « dogme » des 60 ans. Cette équivoque est malgré tout très vite levée. Car dès le lendemain, 20 mai, le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, qui est aussi un candidat putatif aux primaires socialistes en vue de l'élection présidentielle, est l'invité de l'émission « A vous de juger » sur France 2, et prend, à son tour, ses distances avec la règle des 60 ans, refusant tout «dogme» sur l'âge de départ à la retraite. «Si on arrive à vivre 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans, il va bien falloir que d'une manière ou d'une autre ça s'ajuste. Dans beaucoup de pays, c'est la voie qui est choisie.» Et d'ajouter : « Selon que vous faites des carrières différentes, vous commencez plus ou moins jeune d'ailleurs (...), et selon que vous faites un métier plus ou moins pénible, la justice c'est qu'à l'arrivée vous puissiez prendre votre retraite plus ou moins tôt (...) A quel âge? Ça dépend, si l'espérance de vie augmente, il va bien falloir d'une manière ou d'une autre ajuster tout ça.»

    En bref, « DSK » livre sans la moindre gêne le fond de sa pensée. Comme l'avait fait quelques mois plus tôt Martine Aubry. Mais pense-t-il vraiment se mettre en marge de la doctrine officielle du PS ? Ce jour-là, c'est ce que retient la presse : les positions de Dominique Strauss-Kahn et du PS sur les retraites sont irréconciliables. Or, la vérité, que l'opinion n'a pas forcément comprise, n'est pas celle-ci : entre un « DSK », qui ne veut pas faire des 60 ans un « dogme » et le PS qui est d'accord sur l'allongement de la durée d'activité, les désaccords sont moins profonds qu'il n'y paraît. Dans un cas comme dans l'autre, on a de toutes façons rompu les amarres décidées au Congrès de Dijon.

  • Les besoins de reconnaissance des petits marquis
    • Le 30 juillet, le FMI apporte son appui à la réforme. Ce jour-là, le Fonds, dont le directeur général est le socialiste Dominique Strauss-Kahn, publie un document (que l'on peut consulter ci-dessous) sur le sujet des retraites. Sur son compte Facebook, le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre y discerne un «hommage» au gouvernement, et un «camouflet» pour la gauche.

    Pour agrandir le document, cliquer sur « Fullscreen »

     

     

     

    Cliquer sur le document pour l'agrandir

     

    A la page 30 de ce document, figure un alinéa 40 qui résume tout – il est aussi ci-contre : «La réforme qui vient récemment d'être annoncée met à juste titre l'accent sur l'allongement de l'âge effectif de départ à la retraite, dans le souci de réduire les déficits des régimes des retraites.»

     

     

    •  Le 14 octobre, Martine Aubry demande la suspension du débat au Sénat. Invitée de l'émission « A vous de juger » sur France 2, elle explique pour la première fois par le menu les raisons pour lesquelles elle a poussé le PS à faire sien l'allongement de la durée de cotisation prévue par la réforme de 2003. Mais à dire vrai, l'opinion ne s'y attarde pas trop et l'affaire ne fait pas trop polémique. Car, depuis la fin de l'été, le mouvement de protestation n'a cessé d'enfler. Et la rue, non sans raison, ne s'attarde pas aux chamailleries qu'elle peut considérer comme secondaires ou contreproductives.

    L'essentiel est ce qui unit, contre la réforme voulue par Nicolas Sarkozy. A bon droit, les téléspectateurs peuvent donc retenir de la prestation de Martine Aubry que ce qui apparaît essentiel : ses vives critiques contre l'iniquité de la réforme gouvernementale, sa demande pressante que l'examen du projet, en cours au Sénat, soit suspendu.

     

    Pendant tout un temps, on est donc fondé à penser que le PS est envers et contre tout en ordre de bataille contre la réforme des retraites. N'est-ce pas le cas, puisqu'il est contre la remise en cause de la retraite à 60 ans, ce qui est le plus petit dénominateur commun de tous les manifestants.

     

    Le Parti socialiste est ainsi fait, pourtant, que la paix ne dure jamais longtemps.

     

    • Le 19 octobre, Benoît Hamon remet en cause l'allongement de la durée des cotisations. C'est une nouvelle volte-face, totalement inattendue. Comme le raconte le site internet de l'Express, Benoît Hamon annonce que le Parti socialiste négocierait avec les syndicats sa position sur la durée de cotisation pour obtenir une retraite s'il accédait au pouvoir en 2012. Evoquant cet allongement prévu par la réforme de 2003 auquel le PS s'est discrètement rallié, il explique : « Le Parti socialiste a arrêté une position. La question c'est : s'il vient au pouvoir, cette position, la négociera-t-il ou pas ? Evidemment que oui. Il la mettra en débat. » Et d'ajouter : « Si demain les conditions économiques sont réunies pour qu'on le fasse, bien évidemment qu'on préférera faire travailler les salariés 40 ans que 41 annuités et demie ou 42 ans. »

    Mais aussitôt, la sortie a le don d'en énerver quelques-uns. Trop de petits marquis en mal d'existence ou de reconnaissance ; trop d'ambitions individuelles et trop peu de projets collectifs : très vite, la médiocrité des petits calculs personnels reprend.

     

    • Le 21 octobre, Manuel Valls défend la retraite par points. Le député socialiste et maire d'Evry, Manuel Valls, est le premier à se relancer dans cette course aux petites phrases. Invité de France Inter (voir la vidéo ci-contre), il joue sur son registre habituel : à droite toute ! Estimant qu'il « ne doit pas y avoir de tabou », même dans le cas des 60 ans, défendant l'allongement de durée de cotisation, il applaudit aussi le système hautement dangereux pour le système par répartition de la retraite par points – que le sénateur centriste Jean Arthuis vient de prendre comme cheval de bataille.

    Estimant malgré tout que la réforme de la retraite à 60 ans doit être défendue pour ceux qui ont commencé à travailler tôt, il se fait couper la parole par le journaliste qui l'interroge. Ce dernier lit une phrase que Manuel Valls a écrite dans un livre récemment publié : « Si nous restons bloqués sur l'acquis des 60 ans, nous perdrons toute crédibilité. »

     

    Le même jour, Martine Aubry essaie de faire taire tout ce tohu-bohu, en soulignant que le Parti socialiste est favorable à l'allongement de la durée de cotisation jusqu'à 41 ans et demi. « Nous avons toujours dit que, dès lors que l'espérance de vie s'accroissait, il fallait prendre en compte une augmentation de la durée de cotisation, à condition d'en exclure ceux qui ont commencé à travailler tôt, qui ont eu des emplois pénibles ou des carrières hachées, d'où notre défense des 60 ans. »

     

    Alors qui croire ? Au terme de cette lassante chronique des contradictions socialistes, plusieurs constats sautent aux yeux.

     

    D'abord, tout cela donne le sentiment d'un formidable désordre. Comme dans une pétaudière ! Alors que le formidable mouvement de protestation contre la réforme de Nicolas Sarkozy devrait servir de guide à l'opposition pour œuvrer, sans attendre 2012, à un débouché politique, les socialistes, suivant leurs mauvais penchants, se dispersent trop souvent en de médiocres querelles subalternes et oublient un jour les promesses qu'ils ont faites la veille.

     

    Mais pour le plus long terme, c'est tout aussi inquiétant. Car si les socialistes reviennent au pouvoir, quelle réforme des retraites mettraient-ils en œuvre? Si c'est Dominique Strauss-Kahn qui a la main, sera-t-il engagé par la promesse du retour à 60 ans, lui qui l'a brocardée ? Ce retour à 60 ans ouvrirait-il le droit à une retraite à taux plein ou seulement à une retraite amputée ? La très réactionnaire réforme de la retraite par points, qui compte des partisans à gauche, verrait-elle le jour ?

     

    Pour tous ceux qui, avec pugnacité et persévérance depuis plusieurs longues semaines, manifestent ou front grève, c'est consternant mais c'est ainsi : souvent socialistes varient.

     

     

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  • Je veux parler de tout ou presque, enfin je n'ai pas envie de me limiter sur un sujet ou l'autre. I want to talk about everything well or almost everything, indeed I don't fancy limiting myself to a subject or another...
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